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— O dieux de l’Anahuatl ! gémit Doña Luisa en fermant les yeux d’où glissèrent des larmes. Ayez pitié de votre servante !

Les deux hommes partageaient son angoisse. Surtout en se souvenant des derniers mots de Gilles : « Veille sur elle… » Et Aldo était là, impuissant, parce qu’il savait que, si lui ou Adalbert bougeaient, les hommes qui les tenaient en joue tireraient sans hésiter, au risque d’atteindre la vieille dame. Elle le comprit :

— Ne vous occupez pas de moi si vous voulez vous échapper…

La porte venait de claquer derrière Gregory. Ils échangèrent un coup d’œil :

— Je vais essayer, glissa Adalbert à l’oreille d’Aldo. Toi, tu as femme et enfants… Donnez-moi le couteau, Doña Luisa !

— Non ! Ne bougez pas ! Regardez ! reprit Aldo.

À l’abri de la galerie, deux hommes, sortant sans doute des cuisines, s’avançaient à pas de loup sans faire le moindre bruit. L’un avait un pistolet et l’autre une winchester. Ce dernier était un paysan d’une cinquantaine d’années mais son compagnon, celui qui tenait l’arme au poing, n’était autre que le jeune Faugier-Lassagne. Aucun des guetteurs ne les avait aperçus, attentifs qu’ils étaient à surveiller les mouvements des prisonniers. Pourtant il fallait prévenir ce secours envoyé du ciel… Mais comment ?

C’est alors qu’éclata le cri. Venu de la chambre d’Isabel, il était si aigu, si désespéré qu’il fit tourner la tête à tout le monde. Libéré en un clin d’œil, Adalbert renversa le lourd fauteuil où était attachée la vieille Mexicaine qui se retrouva les jambes en l’air mais protégée par l’épaisseur du siège en chêne, puis se précipita sous la galerie. L’un des hommes tira et Aldo en profita pour rejoindre son ami.

— La chambre, François ! Isabel y est avec…

Une salve lui coupa la parole, aussitôt suivie d’une seconde. La winchester venait de cracher et l’un des veilleurs gisait à terre. Mais l’attention de ceux qui étaient postés aux fenêtres était détournée et la fusillade devint générale. Par chance, Aldo avait remis la main sur son revolver et Adalbert sorti le sien de sa chaussette. Du renfort arriva des cuisines. La salle s’emplit de fumée sans que l’on pût savoir de quel côté penchait le sort. Le désordre fut à son comble quand quelqu’un sortit un brandon enflammé de la cheminée et mit le feu aux rideaux ainsi qu’à un fauteuil.

— Doña Luisa ! cria Aldo. Il faut la sortir de là !

Le fauteuil renversé où elle était entravée était, en effet, à proximité immédiate du début d’incendie. En outre, les mèches de ses cheveux entortillées dans les sculptures l’empêchaient de bouger. Aldo commença par tirer le pesant meuble derrière une colonne et chercha quelque chose pour la délivrer. Des ciseaux apparurent soudain dans son champ de vision :

— Essayez donc avec ceci, conseilla la chanoinesse de Saint-Adour.

Ne l’ayant encore jamais vue, il la considéra avec stupeur. Cette voix de femme distinguée émanant d’un attirail complet de campagnard avait de quoi désorienter mais il comprit rapidement de qui il s’agissait :

— Veuillez m’excusez, Madame, mais que faites-vous dans ce pandémonium ?

— C’est moi, le chef…, secondée par un de mes amis qui est en train de faire le ménage dans le parc… Et puis laissez-moi opérer ! Vous vous y prenez comme si vous deviez tondre un mouton.

Reprenant les ciseaux, elle coupa soigneusement et avec toute la délicatesse nécessaire les mèches grises coincées dans les sculptures du bois.

— Allez voir ce qui se passe à l’étage, ajouta dame Prisca. On va s’occuper d’elle et la ramener à la maison…

Sans plus chercher à comprendre, Aldo escalada l’escalier et rejoignit Adalbert devant d’une porte ouverte où se tenaient deux hommes coiffés de bérets basques :

— Regarde ! fit l’archéologue. Voilà une image que je ne suis pas près d’oublier !

Aldo non plus. Sur le lit dévasté, Isabel, crucifiée, pleurait dans sa robe déchirée. À terre gisait le corps sans vie du dernier des Solmanski et, debout devant lui, François-Gilles Faugier-Lassagne, substitut du procureur de la République, le contemplait d’un œil vide. Il tenait encore à la main le revolver avec lequel il l’avait tué…

Sans un mot, Adalbert le lui enleva, essuya soigneusement l’arme avec son mouchoir avant d’y imprimer ses propres empreintes :

— Moi, je ne risque pas grand-chose, expliqua-t-il à Aldo. Et j’ai Langlois en arrière-garde. Tandis que ce jeunot, victime de ses sentiments ? Je vois d’ici les gros titres à la une de la presse : « Un procureur de la République abat l’assassin de son père… »

— N’exagérons rien : parrain suffirait !

— Bah, il s’en trouverait bien un pour dénicher la vérité… D’autant qu’il va hériter… et n’importe comment, sa carrière serait fichue. Surtout à Lyon !

— Il va falloir le lui faire avaler. Il a une fâcheuse attirance pour la vérité…

— Ça lui passera. Il n’est pas idiot…

Le temps des explications de cette nuit insensée vint plus tard, après l’obligatoire passage des gendarmes et du juge d’instruction de Bayonne. Après aussi qu’une bonne partie des participants, côté contrebandiers, se fut dissoute dans la nature, ne laissant en ligne que Mme de Saint-Adour et ses « gens » venus spontanément au secours de vieux amis en grand danger. Lequel danger se trouva confirmé par la découverte, dans les caves, du cadavre de Don Miguel Olmedo de Quiroga, de celui d’un gangster new-yorkais dont on ne savait trop ce qu’il faisait là, accompagnés d’un Alcide Truchon, de l’agence « L’œil écoute », devenu à moitié fou de terreur.

Naturellement il y eut d’autres arrestations que celles des trois ou quatre Américains rescapés de la bataille.

Elles vinrent donc un peu plus tard, lesdites explications, autour du café et du grand feu allumé dans le salon de Saint-Adour, après qu’Honorine eut pratiquement bordé dans leurs lits les deux Mexicaines parvenues aux extrémités de leurs forces. La découverte du corps de Miguel dans la cave d’Urgarrain avait été pour elles l’estocade finale et elles avaient accepté avec reconnaissance l’hospitalité que leur offrait celle qui avait été le principal artisan de leur libération. À la stupeur totale d’Aldo – Adalbert avait sur le sujet une longueur d’avance ! –, il venait d’apprendre que le chef des contrebandiers apparus si fort à propos dans la nuit tragique n’était autre que Prisca de Saint-Adour. Elle s’en était expliquée sans détours superflus :

— Le fisc de votre damnée République nous tourmente à longueur d’année, nous autres, agriculteurs. Il faut bien se dédommager quelque part. À l’exception des gendarmes qui préfèrent rester dans leurs pénates que galoper la nuit dans les montagnes et de rares réfractaires trop convenables pour des dénonciateurs, le pays est pour moi.

Tandis que Marie-Angéline, aux anges, s’étranglait de rire, Tante Amélie avait pris la nouvelle sans surprise excessive et même avec amusement. Rien ne l’étonnait plus venant de sa cousine et, à la limite, elle trouvait l’aventure réconfortante :

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